Je te dis pas comme j'y ai cru. Je te dis pas comme je m'y suis vu, là haut... non non, pas sur la colline, en champion du monde de F1. Faut dire que je l'avais rêvé des dizaines de fois, avant, quand j'allais encore à l'école pas loin du circuit. Même en classe, la maîtresse était obligée de me secouer pendant que j'hurlais des trucs en brésilien. On a même fait venir un psychologue avec mes parents, qui pensait que je souffrais d'un toc. Mais à vrai dire, j'ai jamais trop su ce que c'était un toc, sauf que papa Michaël il en avait un : être champion du monde. J'aimerai bien avoir le même, mais j'attendrais.
A un virage près, c'était bon hein, faut pas croire. C'est à cause de cet imbécile de Timo Glock, qui avait oublié de mettre des pneus pluies. On m'a dit que s'il en avait mis, il n'aurait jamais été là. Mais moi, j'ai surtout répondu que s'il en avait mis, il aurait pas été à l'arrêt dans le dernier virage, ce clown. Enfin, jusque là, le week-end était parfait. Et je peux te dire qu'un week-end parfait chez Ferrari, ça faisait longtemps que c'était pas arrivé. On savait même plus ce que ça faisait, on a été bien surpris. Mais tout le monde était méfiant, on savait qu'on pouvait oublier un pneu au ravito, perdre un aileron en sortant des stands derrière Kazuki... Bref, on en menait pas large. Mais à côté des pitres de chez MaqLareine... c'est bien simple, on aurait dit qu'ils venaient de revoir le dvd des meilleurs moments de Gaston Mazzacane. Pour en revenir au commencement du début, j'avais pris un super départ. En même temps, j'étais en pole, et quand je pars en pole, je suis imbattable (c'est pas moi qui le dit hein). Bon, il a fallu rentrer vite fait bien fait pour changer les pneus, parce que la météo au Bresil c'est un peu n'importe quoi. Tu passes de la Bretagne à PACA en 25 secondes, faut s'adapter. Bref, je suis quand même ressorti en tête, devant Vittel et Fernando. Vittel, j'peux te dire qu'il m'a mis la pression. D'ailleurs, vu comme il est bouillant en ce moment, ses potes ont décidé de le renommer Volvic. Kimi lui, m'a tapé sur l'épaule après la course, et il m'a dit : "Et toi, t'étais plutôt Hépar quand tu l'as vu dans tes rétros, non ?". Ca a fait rire Fernando, mais moi, j'ai pas compris. Enfin le Vittel, je l'ai remis en place vite fait bien fait. Quand il s'est approché, j'ai sorti la tête et je lui ai hurlé : "EH LE GAMIN, ICI C'EST PAS MONZA TU FAIS PAS CE QUE TU VEUX HEIN". Faut pas me chauffer moi, je suis un brésilien, un vrai. Ni une ni deux, le Vittel a dégagé. Il a pretexté une stratégie décalée. Ouais ouais, il a surtout pris une grosse veste et il a rien trouvé de mieux que de se cacher dans les stands. Rien dans le ventre ces jeunes. Il restait Fernando. Il m'a pas rendu la vie facile, alors qu'il m'avait promis de m'aider pour le titre. Mais bon, je crois que les espagnols, c'est tous les mêmes : ils parlent, ils parlent, mais quand ils voient du rouge, ils savent faire que foncer tête baissée. J'ai quand même réussi à pas trembler (enfin si, mais pas comme Park Hinson quoi, le coréen de manechessterre qui a inventé le sport élec).
Réfléchir is nothing.
Il restait une dizaine de tours, et j'étais bien installé en tête. Derrière, Fernando et Kimi se mettaient minables, j'te dis pas comment. Kimi, je me demande toujours s'il prend pas un avion pour finir ses courses. Bref, Lewis était 4ème, et presque assuré d'être champion. Mais j'entendais quand même le public qui gueulait. Moi d'abord, ça m'a un peu perturbé, je commencais à avoir vachement mal au crâne. En fait, ces couillons, ils gueulaient "CHUVA, CHUVA". Alors moi j'ai réfléchi, puis j'ai sorti la tête en criant "CHUPS, CHUPS ?". J'ai demandé à la radio : "Ils veulent des sucettes ou quoi ? On est pas là pour ça !" J'te dis pas comment ça m'a énervé ça. C'est là que j'ai entendu à la radio que chuva ça voulait dire pluie en bresilien. J'avais quand même du mal à comprendre : "Ils se prennent pour Alain Gillot-Pétré ou quoi ?". N'empêche que ça a marché. Pas plus tard qu'un peu plus tard, il s'est mis à pleuvoir ! Mais de la pluie, de la vraie pluie ! Comme quand on va dans le pays de Lewis, celui où y a un truc avec des aiguilles et qu'ils appellent ça big bang, et celui où y a la reine de Maq. Là je t'avoue que j'ai pas tout suivi. Les gars gueulaient encore plus fort, ça faisait un bruit pas possible. J'ai demandé à mon stand s'ils pouvaient pas faire chanter la copine de Lewis plutôt, enfin s'ils pouvaient la mettre sur l'écran géant aussi, mais on m'a répondu qu'il fallait que je rentre pour changer de pneus. C'est vrai que ça commencait à glisser, on aurait dit le trophée Andros, sans les compotes. En ressortant, j'ai entendu que j'étais toujours premier, et que les autres étaient trop loins pour me rattraper. J'avais donc juste à assurer qu'on m'a dit dans le stand, sauf qu'assurer moi, c'est pas ma cup of tea. Quand je suis arrivé au virage numérojesaispluscombien, on m'a annoncé que Lewis était 5ème, et que Vittel lui collait au derrière. Tu me diras, Vittel sous la pluie, il est un peu dans son élément, alors j'ai demandé au public de gueuler en bougeant les bras : "SUCETTE, SUCETTE... EUH CHUVA CHUVA, CHUVA VITTEL, VOLVIC CHUVA !". Tu parles, ils étaient bien trop occupés à m'encourager ces idiots, ils m'ont pas entendu. Par contre, j'ai appris que quelqu'un m'avait entendu dans le stand, puisqu'un gars avait le tympan explosé à l'arrivée. Mais pas grave, l'autre Vittel, il faisait le job. Il a passé Lewis, je sais même pas comment il a fait avec sa taureau rouge, quand on voit ce que fait l'autre Bourgay. Lewis était 6ème, j'étais champion virtuel. Comme quand je joue à F1 carreer challenge, je suis toujours champion virtuel, sauf que je suis obligé de prendre Kimi sinon ça marche pas. Sauf que là, j'étais champion virtuel réel, ou champion réel virtuel, ou virtuel champion réel. Enfin bref, j'ai pas trop eu le temps de mettre les mots dans l'ordre, fallait surtout que je reste sur la piste. C'était pas si simple, j'ai filé des coups de volants dans tous les sens, mais j'ai finalement réussi à franchir la ligne. Maintenant, j'attendais. A la radio, j'ai eu l'impression qu'ils m'avaient foutu le retour son de TF1 : y'avait un gars qui gueulait (pas chuva, mais quand même), et un autre qui baffouillait dans tous les sens. Bref, une catastrophe. Et là, on m'a dit : "Lewis est 5ème, il est champion". Eh, d'habitude, c'est pas le 5ème qui est champion, c'est le 1er. C'est pas un peu de l'arnaque tout ça ? J'étais dégoûté.
Tout le monde voulait me réconforter, mais moi j'avais pas envie, je boudais. Sur le podium, j'étais avec Kimi et Fernando, mais y'avait pas Lewis. Y'avait pas Timo Glock non plus, et heureusement pour lui, sinon je lui aurai cassé les dents avec ma bouteille de champagne. En parlant de bouteille de champagne, Kimi m'a demandé si je voulais pas lui laisser la mienne, que c'était pas bon de sombrer dans l'alcool après une déception. Mais moi je le vois venir le Kimi, il voulait en ramener une gratos au père noel, dans son pays là bas, en Laponie. En bas, j'ai vu Lewis qui fêtait son titre dans son stand. J'ai fait mine d'aller le féliciter pour son titre, mais en fait, je voulais surtout récupérer un autographe de sa copine. J'ai rien eu du tout, parce que je l'ai pas trouvé. Par contre j'ai trouvé Kazuki, assis sur le muret et qui engloutissait une maxi boîte de choco BN. Je suis allé m'asseoir à côté de lui, et il a tout caché sous sa casquette. Je lui ai fait : "allez, partage, on est tous les deux tristes, on doit se serrer les coudes". Il m'a regardé, il s'est levé, et il m'a dit : "Tu sais pas où il est, Nico ?". J'te jure. Nico, il était avec Lewis, ils sont copains comme cochons ceux là. Alors Kazuki s'est assis, et m'a filé son paquet. Il s'est mis à pleurer, je savais plus comment faire pour le consoler. Mais heureusement, Piquette est arrivé. Sauf que lui, il a encore rien compris, il croyait que j'étais champion et qu'on fêtait le titre. Ni une ni deux, je lui ai craché mes BN au visage. Je te dis pas la tronche qu'à fait Kazuki, on aurait dit Jacky Chan avec une combi. Les deux se sont jetés sur moi, et m'ont foutu par terre. La soirée était vraiment horrible. Mais heureusement, j'ai eu un réflexe avant de me faire taper. J'ai levé les yeux au ciel, et j'ai hurlé : "CHUVA CHUVA".